Basée à Genève, Mercuria Energy Group est active essentiellement dans le négoce du pétrole et autres produits pétroliers. Elle a été fondée en 2004 par deux traders suisses, Marco Dunand et Daniel Jaeggi. Connus dans le monde du trading sous les sobriquets de «Bambi et Godzilla» selon un article du Wall Street Journal datant de 2014, les deux associés font rapidement passer la société d’une petite entité d’une dizaine d’employés à la 4e plus importante entreprise du domaine au niveau mondial. Il faut dire qu’ils sont allés à bonne école, puisqu’ils avaient au préalable fait leurs armes notamment chez le géant des produits agricoles Cargill, et la banque Goldman Sacks, dont ils débaucheront d’ailleurs pas mal de spécialistes en trading.

Aujourd’hui, la société compte plus de 1000 employés, a ouvert 38 filiales dans le monde - à Singapour, en Chine, au Canada, aux Etats-Unis, etc. - et est active dans plus de 50 pays. Au fil des ans, elle a fortement diversifié ses activités, les élargissant à d’autres formes d’énergies, telles que le charbon, le gaz, les biocarburants et la vente d’électricité, ainsi qu’à des marchandises dites sèches (métaux) et à toutes les étapes de la chaîne de production, c’est à dire les infrastructures de logistique, de transport et de stockage.

En 2018, son chiffre d’affaire se montait à 122 milliards de dollars. Les quantités de matières premières vendues sont quant à elles passées de 195 millions de tonnes d’équivalent pétrole en 2013 à 355 millions de tonnes d’équivalent pétrole en 2018.

Heu… c’est quand au juste qu’on commence à réduire l’utilisation des énergies fossiles?

Mercuria s’est aussi engagée sur le terrain des banques. En 2014, elle rachète le pan «matières premières» du géant JP Morgan Chase & Co, favorisant ainsi son accès au marché américain. Elle ouvre également des lignes de crédit à des producteurs de pétrole en difficulté, à l’instar de Noble group, un groupe de trading honkongais, auquel elle avance par exemple 400 millions de dollars à l’automne 2017.

Et à quoi cela sert-il que des banques se désinvestissent du fossile, si ces entreprises prennent le relais, et de plus belle?

L’entreprise est également l’un des grands propriétaires indépendants de concessions de schiste argentin. Elle a notamment acquis 80% d’une société disposant de multiples droits de forage dans ce pays. Sans oublier des projets pétroliers en Tunisie, des mines de charbon en Indonésie et Afrique du Sud, etc. Elle acquiert aussi plusieurs sociétés, dont Rocky Mountain Crude Oil LLC (RMCO) en 2016, une société de transport de brut par camions implantée aux Etats-Unis, ou encore Aegean Marine Petroleum en 2018, un fournisseur de combustible marin qui est renommé Minerva et dont le siège passe de Grèce à Genève.

La même année, Mercuria, dont le capital appartenait jusque là exclusivement à ses deux fondateurs et à un groupe d’employés de longue date, vend une participation de 12% au groupe chinois ChemChina, spécialiste de la chimie et présent notamment dans les secteurs des pneus automobiles, du raffinage de produits pétroliers, ou des produits fertilisants (il est intéressant de savoir que ce groupe détient pas moins de 82 % du groupe Syngenta). Avec cet accord, la firme genevoise s’offre ainsi un accès facilité au plus grand des marchés des matières premières.

Et ce n’est là qu’un petit échantillon de ses activités…

D’après Public Eye, Mercuria est aussi concernée par des affaires obscures se déroulant en Afrique. L’ONG cite notamment l’entreprise dans un rapport daté de 2013 sur les profits que plusieurs géants suisses des matières premières tirent de la corruption et des problèmes de gouvernance au Nigéria, ou encore dans une enquête de 2016 sur le commerce de carburant sale, dont certains inondent le continent.

Sources et approfondissement :

Marco Dunand, patron de Mercuria: «Notre approche est assez intellectuelle», Le Temps, 17-12-2018

Marco Dunand: «La concentration du négoce se poursuit», Le Temps, 19-03-2018

What Is Mercuria?, New York Times,19-02-2019

JPM deal propels Mercuria to elite club of commodity titans, Reuters, 19-04-2014

Meet The Mysterious Firm That Is About To Leave Blythe Masters Without A Job, ZeroHedge, 03-07-2014

ChemChina Acquires 12% Stake in Swiss Commodity Trader Mercuria, Bloomberg, 18-02-2016

Dirty Diesel: Trafigura continuera de vendre des carburants toxiques, PublicEye, 07-11-2016

Les affaires obscures des négociants suisses au Nigeria, PublicEye, 04-11-2013